Longues crêtes oubliées par un pottok menaçant la vie. Le chemin divague près du brouillard, proche du précipice.
Ces pentes, jalouses de verdure, invitent au remède par la beauté. Les brebis bleues inversent le ciel délicatement.
Ces lieux remémorent d’antiques traversées, de celles qui se gravent dans les plis des hêtres. Ces arbres têtards ignorent tout de leurs légendes, figent chaque pas.
Notre groupe se libère au fur et à mesure de son avancée, heureux de laisser les difficultés derrière. Au bout de quelques heures, les jambes flottent d’elles mêmes, comme une impression d’apesanteur.
L’itinéraire de descente, si fin, est comme un poème laissé à la montagne :
La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.
Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.
Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants, Doux comme les hautbois, verts comme les prairies, — Et d’autres, corrompus, riches et triomphants,
Ayant l’expansion des choses infinies,
Comme l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens, Qui chantent les transports de l’esprit et des sens.
Baudelaire, Les Fleurs du mal IV
Envoutés par ces profondes pensées, nous dévalons vers l’alléchant Baigorry : refuge sacré de la première gorgée, du patxaran évocateur, et du lit réparateur.
Le lendemain, la légèreté des mots n’allège pas nos jambes contrariées. L’échauffe prend son temps, disperse quelques récompenses au gré du vent. Le vautour tarde à prendre son envol, souhaitant nous montrer le passage.
A présent, tout devient bucolique.
Par une tendre alchimie, ensemble, nous prenons un dernier élan pour plonger dans la grande bleue.
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