Ce matin, la vallée s’enveloppe d’une brume épaisse, bloquée entre les inversions temporelles, vestiges d’immenses écobuages.

Les voitures partent à la ruée vers l’or, blanc, si rare, si capricieux.

Les remontées balayent l’herbe rase d’un début d’hiver, il y a comme une atmosphère irréelle.

Un serpent de chemin nous conduit sur la croupe que nous ne quitterons plus. A cheval entre deux mondes, celui du silence froid, imperturbable et angoissant, l’autre lumineux, planant et bruyant. Seuls les animaux peuvent supporter ces deux entités. Impossible pour l’humain de vivre dans l’ombrée. Chacun cherche sa lumière, son soleil, sa chaleur pour éclairer le chemin de vie.

Notre « luz » est en Espagne. Une autre montagne, une autre plaque, une autre atmosphère. les sommets se transforment en Pena, les hêtres en pins, les voutes en célestes, les villes en villages abandonnés, la mort des bistrots en vie des bars à tapas.

Notre refuge est un salon social, à l’ambiance cluedo, il ne manque que la clé à molette.

Comme à leur habitude, les sommets aragonais opèrent avec magie, nous laissant hagards après l’Anisclothésie. Le gypaète parade à contre courant sur Air Quebratan (la compagnie des anti drones). La neige fige les coussinets de la belle mère, et cède au pas qui hésite.

A chaque saison, le paysage s’emplit de beauté, et distille ses plumes à vue.

A minuit, nous tentons de gober les 12 grains de raisins sur la Puerta Montanesa. Même ici, le virtuel remplace la traditionnelle bise, laissant la chaleur festive s’évaporer dans les ondes communicatives.

Les virages et le café noir nous remémorent les excès de la veille. La pause à la frontière est aussi brutale qu’une descente sur de la glace.

Tels des automates, nous déambulons dans un néant minéral cherchant le confort dans l’inconfort. La fraicheur emporte nos rares paroles dans ce dédale lunaire.

De l’autre côté, par chance, le camion connaît la route, nous dépose dans le gave, au dedans du boulevard…

Le compte rendu photo de Denise est ici.